Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

REBEYROTTE Laurent

Le communicant d’Autun

Si Antoine Rebeyrotte, il y a juste un siècle, n’était pas venu chercher fortune au bord de l’Arroux, l’histoire d’Autun en eût été changée. Théophile, son fils, n’aurait pas dirigé les tanneries Philibert ; Remy, son petit-fils, ne serait pas maire de la ville ; et Laurent, son arrière-petit-fils, neveu du précédent, n’y aurait pas fondé, en 1993, la plus régionale des agences de communication. Heureusement, le grand père Antoine a préféré le Morvan à sa Corrèze natale – où une « rebeyrotte », en patois local, est une petite rivière qui relie les villages, contourne les obstacles, valorise les fermes, réunit les habitants. Qui crée du lien.
« Créer du lien ». Le jeune Laurent, très tôt, en fera sa devise. Alors qu’il s’est inscrit aux Beaux-Arts, à Mâcon, l’un de ses profs le prévient : « Tu n’es pas fait pour être artiste ! » Ce n’est pas que son élève dessine mal : à l’époque, il publie même des caricatures dans l’Indépendant du Morvan. Mais, à l’évidence, il est incapable de s’enfermer dans une discipline. Il touche à tout, il invente, il entraîne. A Mâcon, il anime des émissions nocturnes sur une radio libre. A Autun, avec quelques copains étudiants, il fonde les « Restos du cœur ». Après avoir tâté de la publicité, il entre à l’imprimerie Pelux, où il reste cinq ans : n’essayez pas de le rouler sur le coût d’une brochure en quadrichromie…
Sachant rédiger, dessiner, mettre en page, inventer des slogans, ce créatif aurait pu monter à Paris « faire du rought » dans quelque prestigieuse agence de pub. Mais il est peu enclin à la stabilité. Ce qui l’attire, c’est l’inédit, l’événementiel, l’animation. De son musicien de père, il a hérité le sens de la scène et le goût du micro. Il opte pour un métier où chacun met ce qu’il veut : la communication. Et surtout, il décide de rester chez lui, dans son terroir. C’est au cœur d’Autun, en face de la cathédrale, qu’il fonde l’agence LR Communicability et commence à prospecter auprès des entreprises locales. Il rame. Il apprend. Il a 27 ans.
« Du cœur naît la forme », assène la nouvelle agence, dont le logo représente un artichaut. Comme pour expliquer aux patrons de PME, peu portés sur la « com », que le cœur de leur activité peut revêtir différents habillages. A Autun, LR travaille pour les tabourets Tolix, les parapluies Neyrat, les enseignes Neotubex. Non sans plaisir : « Sur le terrain, les capitaines d’industrie n’aiment pas le blabla, ils veulent du concret et marchent à la confiance ». Bientôt Rebeyrotte élargit sa palette avec l’Office de tourisme d’Autun, les Nicephore Days de Châlon, le Comité régional de Tourisme, la FDSEA, Thomson, le Crédit Mutuel, etc. Avec le souci constant de ne pas se laisser enfermer dans la routine.

LA BOURGOGNE
A PARIS

Justement, en 2001 se profile une aventure hors normes : la Bourgogne étant « hôte d’honneur » du Salon de l’Agriculture en mars 2002, le Conseil régional lui confie la conception et la régie de l’espace de 3.300 m2 qu’il entend réaliser à cette occasion. « Un projet fou, d’autant que je n’avais jamais réalisé de stand ! » Ce stand-là coûtera 9 millions de Francs ! Un an de stress, des dizaines de réunions, des centaines de problèmes à résoudre. Le moindre n’étant pas de fédérer toutes les composantes de la région – filières agricoles, collectivités locales, etc. Un succès, une expérience unique.
Fédérer les intérêts, mettre du lien, faire dialoguer : c’est la spécialité du communicant d’Autun, apôtre du bon sens, qui n’est jamais plus à l’aise que sur une tribune, à débrouiller publiquement des arguments contradictoires. Les politiques locaux le savent : Jean-Paul Anciaux et Jean-Pierre Soisson (à droite), Christian Paul et Marcel Charmant (à gauche) ont fait appel à ses services. Quand il a fallu confronter le projet de tramway parisien aux riverains furibards, la Mairie de Paris a fait venir « le Bourguignon » qui avait déjà officié sur le trajet du futur TGV Rhin-Rhône contesté par les autochtones bressans.
Les bureaux de Laurent Rebeyrotte viennent de déménager. A Mâcon, Lyon, Paris ? Pas du tout. A quelques centaines de mètres, juste en face de sa propre maison, dans une rue escarpée du vieil Autun. Le pas de porte a deux mille ans. C’est là qu’après une réunion, il entraîne ses clients dans sa cave médiévale où il leur fait déguster une bouteille de musigny Comte de Vaugüe. Avec un peu de chance, ils iront manger une poule au riz chez la « Mimi » à Couhard - une auberge morvandelle comme les publicitaires parisiens n’en voient plus qu’au cinéma.
Surpris, les confrères, quand ils constatent qu’il y a toujours de la place pour se garer devant la porte de l’agence ; quand ils saluent nonchalamment l’évêque d’Autun en remontant la rue ; quand ils constatent que l’agence LR n’a toujours que trois salariés, en sus du patron et de son précieux carnet d’adresses. Ainsi, on peut faire sérieusement de la « com », sans frénésie ni pollution, au cœur de la Bourgogne ? Il y aurait donc une vie au-delà du périphérique parisien ?
B.L.

Télécharger le fichier

Publié dans Portraits de Bourguignons | Lien permanent