Le blog de Bernard Lecomte

Quelle magnifique parenthèse que ce voyage du pape en Corse ! Ce fut une journée incontestablement historique, pleine de joie, de bienveillance et de fraternité, ce qui nous a changé de l’actualité de ces derniers mois ! Le pape François, tout souriant, à peine fatigué, était bien "comme chez lui" à Ajaccio, à écouter les chants corses, à saluer les confréries et à bénir des ribambelles d’enfants. La rencontre avec Macron dans une salle d’aéroport, après une telle journée, a eu l’air sinistre. Le retour à la politique va être très dur…

Les catholiques français en voudront longtemps au pape François de ne pas être venu à la cérémonie de réouverture de Notre-Dame de Paris, le 8 décembre. Mais les Corses, eux, sont fous de joie à l’idée de le recevoir le 15 décembre à Ajaccio. Aucun pape n’était jamais venu sur l'Ile de beauté, où le catholicisme est bien plus vivant que dans tous les autres départements français. Décidément, mon livre sur les relations compliquées entre la France et le Vatican tombe à pic…

Gaffe, Séguéla ! A entendre les brèves de comptoir échangées au "Bon accueil" de Cargèse à propos de sa future villa de Bonifacio, le richissime publicitaire a du souci à se faire. L’annulation de son permis de construire intervient au cœur d’un dossier explosif, géant et vital pour les Corses. La plus belle île de la Méditerranée peut-elle laisser bétonner ses côtes – incroyablement préservées – à qui mieux mieux ? Evidemment non. Mais doit-on geler le développement touristique de l’île en interdisant toute construction au bord de mer ? Pas davantage. La sagesse est entre ces deux extrêmes. Elle balance aussi entre la loi républicaine et celle de la mafia. Gaffe, Séguéla !

Vacances à Cargèse, où nous poursuit le dossier de l’émigration. Quand les Grecs de Vytilo menacés par les Turcs ont émigré à Paomia, en 1676, leur réussite a rendu jaloux les autochtones qui les ont sauvagement anéantis en 1715. Après l’annexion de l’île par la France en 1769, Marbeuf installa les rescapés à Cargèse, où ils ont prospéré, mais de nouveaux affrontements ethniques éclatèrent à la Révolution. Puis, peu à peu, les mariages mixes au soleil ont assaini les divergences économiques et culturelles. Et le tourisme, aujourd’hui, achève de faire vivre tout le monde en harmonie. Aujourd’hui, l’église "grecque" de Cargèse, de rite byzantin, fait face à l’église latine, en parfaite intelligence, et le village est un petit paradis.

Les Corses adorent la politique. Le dernier des chasseurs de sangliers, le plus humble berger descendu du maquis connaît tout des bisbilles internes au PS, des rapports entre Sarkozy et Rachida Dati, ou des derniers avatars de la vie sexuelle de DSK. Dans un troquet d’Ajaccio, ce dimanche matin, devant un adorable marché aux fruits et aux poissons, près de la gare maritime, quatre maraîchers discutent ferme devant un café croissant. Ils n’en peuvent plus de commenter la nouvelle du jour : "Fillon a pris trois points". Trois points, Fillon ? C’est fou ! C’est le JDD qui l’affirme ! Ces braves gens n’ont parlé que de cela pendant tout leur petit dej. S’il savait, Fillon !