Le blog de Bernard Lecomte

Bon, évidemment, c’est un hasard, mais il s’avère que j’étais plongé dans la biographie que mon amie Olympia Alberti a récemment consacrée à Mère Teresa (aux Presses de la Renaissance) quand j’ai appris que le footballeur argentin Lionel Messi serait payé 110.000 euros par jour par son nouveau club, le PSG. Autre hasard, tragique celui-là, la mort du père Olivier Maire assassiné par un cinglé rwandais qu’il avait hébergé par pure charité chrétienne. En refermant mon livre, j’étais un peu pris de vertige : Messi, Maire, il y en a un des deux qui va durablement galvaniser les jeunes Français, je me demande bien lequel…

Nos grands médias n’ont pas mesuré l’importance de l’événement – sauf, bien sûr, la presse confessionnelle. Jean Vanier, mort en mai 2019, fondateur de l’Arche (qui s’occupe des handicapés dans le monde entier), était une figure aussi charismatique que l’abbé Pierre ou Mère Térésa. Or on a appris qu'il cachait des secrets inavouables (notamment des abus sexuels sur plusieurs femmes). C’est une douleur extrême qui a frappé, choqué, blessé des millions de gens - pas seulement des croyants - pour qui Jean Vanier, de son vivant, était une sorte de saint laïc. Et qui vivent, depuis hier, un drame indicible.

On va bientôt canoniser Paul VI. Question : tous les papes doivent-ils être canonisés ? L’actuel titulaire du poste a répondu avec humour : "Benoît XVI et moi, on est sur liste d’attente !" Certes, les derniers pontifes ont tous été de sacrées personnalités, ce qui ne fut pas toujours le cas dans l’histoire. Mais qu’un pape canonise un de ses prédécesseurs, cela crée un léger malaise. Et surtout, à chaque fois, on se demande : pourquoi lui et pas les autres ? Si Paul VI devient saint comme Pie X, Jean XXIII et Jean-Paul II le sont déjà, que reproche-t-on exactement à Léon XIII, Benoît XV, Pie XI, Pie XII et Jean-Paul Ier ? Question subsidiaire : l’Eglise n’a vraiment pas de priorités plus urgentes ?

Mariage orthodoxe, tout à l’heure, dans la basilique de Vézelay. Les catholiques présents s’étonnent : à part le rituel (émouvant) et les chants (magnifiques), ce sont bien la même messe, les mêmes prières, les mêmes formules… à un détail près : à l’invocation des saints, entre saint Etienne et saint Germain d’Auxerre, on se prend à prier "saint Constantin", le fondateur de Constantinople, père des chrétiens d’Orient, qui n’est pour les cathos qu’un empereur laïc du IVè siècle ! Sur deux millénaires, il est vrai qu’on relativise les différences. Oui, je sais, pardon, excuse, c’est moins passionnant que de savoir si Manuels Valls et Richard Ferrand seront élus demain aux législatives…

Jean-Paul II en rêvait, le pape François l’a fait : l’archevêque salvadorien Oscar Romero, assassiné en pleine messe le 24 mars 1980, va être enfin béatifié. Le pape polonais, qui était allé prier sur sa tombe en 1983, l’avait qualifié de "serviteur de Dieu", mais les dissensions virulentes qui agitaient alors les évêques du pays ont bloqué le dossier : cet objecteur de conscience fut-il ou non un martyr de la foi ? Les années ont passé. Le pape argentin a tranché. L'Eglise pouvait-elle encore différer cet hommage, attendu par tant de chrétiens... et alors que l’aéroport de San Salvador porte déjà son nom ?

Mardi soir, à Autun, présentation publique du hors série exceptionnel de Bourgogne Magazine sur les saints et saintes de Bourgogne. Saint Germain, sainte Reine, saint Bernard, saint Bénigne, saint Vincent et tant d’autres : deux mille ans d’un incroyable patrimoine spirituel, culturel et artistique qu’aucun journal n’avait encore présenté au grand public. Dominique Bruillot, l’éditeur du magazine qui m’a confié la rédaction de ce dossier magnifiquement illustré, précise malicieusement : c'est un numéro "culte" !

Que les déconstructeurs de stéréotypes se rassurent : la fête des amoureux n'est pas chrétienne, elle a pour origine une vielle fête païenne dédiée au dieu romain Lupercus, les Lupercales, qui n’a rien à voir avec deux prêtres martyrs prénommés "Valentin" au IIIè siècle, que l’Eglise n’a jamais vraiment commémorés. C’est pour éradiquer ce culte antique qu’un pape de la Renaissance a fait célébrer "saint Valentin" le 14 février, ce qu'un autre pape a supprimé quelques siècles plus tard. Le 14 février, l'Eglise fête Cyrille et Méthode, saints patrons de l’Europe – oui mais là, stop, ennui, prise de tête, l'Europe, tout ça, et puis quoi encore ?