Le blog de Bernard Lecomte

Je reviens sur la façon dont le site Edistat (mon blog de samedi) évalue la diffusion d’un livre avant d’en vendre le résultat aux journalistes trop pressés pour se renseigner directement chez l’éditeur. Le panel qui sert à concocter ce résultat (élaboré par des experts de la Sofres qui, apparemment, achètent peu de livres) exclut les ventes en club et les ventes par correspondance, ce qui rend la statistique encore plus incohérente : combien de livres, aujourd’hui, ont une diffusion par le réseau France Loisirs, pour ne citer que cet exemple, au moins aussi grande qu’en librairie classique ?

Bel échange, hier, sur France 2, entre le trio Ruquier-Zemmour-Nolleau et leur invité, l’excellent Pierre Arditi. Lequel fait partie de ces grandes consciences de la gauche culturelle (comme Emmanuelle Béart, Josiane Balasko, Renaud ou la femme de Cantona) qui mettent de côté leur indignation anticapitaliste – la crise, la spéculation, le fric, tout ça – quand une agence de pub leur offre un gros chèque pour faire la promo… d’une banque ! De l’ex-Crédit Lyonnais, en plus ! Arditi n'a pas nié, son humour et son talent ayant transformé ce bras de fer idéologique en une magnifique séance de théâtre et de rigolade. Bon. Mais quand même.

A combien un livre s’est-il vendu ? Un nouveau site appelé Edistat propose désormais, pour pas cher, cette information. En un clic. Facile. Sauf que les chiffres d’Edistat sont ineptes car ils reposent, à la façon des sondages par téléphone, sur un "panel représentatif" de caisses prises chez un millier de libraires auxquels on attribue un coefficient. Or, les techniques valables pour la Badoit ou le Nutella ne le sont pas pour les livres ! Croyez-en l'éditeur : si la BD bourguignonne La Bourgogne, quelle histoire ! s’était vraiment vendue "à 1.443 exemplaires" (en réalité, largement plus de 20.000), il y a belle lurette que les Editions de Bourgogne auraient fermé leurs portes !

La France ne peut pas faire grand-chose en Côte d’Ivoire, tant les liens franco-ivoiriens sont troubles. L’ex-président qui s’accroche au pouvoir, Laurent Gbagbo, a été conseillé par l’agence EuroRSCG et quelques experts proches du PS français (Stephane Fouks, Marcel Gross, etc) : comment ceux-ci étaient-ils rétribués ? Quels sont les intérêts de tous ces pontes du PS (Emmanuelli, Loncle, Josselin, Lang, Le Guen, Cambadélis, etc) très proches du "socialiste" Gbagbo ? Pourquoi l’ancien ministre des Affaires étrangères de Mitterrand, Roland Dumas, a-t-il couru aussi vite à Abidjan pour défendre Gbagbo ? Eclaicir toute cette embrouille serait assez urgent, non ? 

On va donc pouvoir se présenter aux élections présidentielles à 18 ans. Voilà une super mesure, parfaitement démagogique et rigoureusement inutile. Imagine-t-on plus de 50 % des Français confier leur destin économique et nucléaire à un gamin de 18 ans ? Alors, à quoi bon ? Réponse : à enfumer le citoyen. Pendant ce temps, on enterre la seule mesure capable de rajeunir vraiment notre classe politique qui, est rappelons-le, la plus âgée de toute l’Europe : la limitation du cumul des mandats. En France, quand un politicien réussit enfin à se faire élire, il passe ensuite le plus clair de son temps, jusqu’à sa mort, à empêcher de plus jeunes que lui de prendre sa place !

Dans Marianne de cette semaine, des personnalités répondent à la question générique : "Et vous, qu’est-ce qui vous indigne ?" Interrogée parmi bien d’autres, l’inénarrable Geneviève de Fontenay répond qu’elle est choquée de voir que les deux journalistes otages en Afghanistan ne sont pas libérés, alors qu’on avait fait tout un tralala à la libération d’Ingrid Betancourt ! Comme quoi il n’y a pas que la télé pour préférer la notoriété d'un pipole à l’intérêt de son propos. Celui-ci, on l’admettra, pulvérisant les limites de l’ineptie. Marianne a bien mérité ce coup de chapeau.

Cette semaine, dernier adieu à Bernard Mazières. Son assassinat dramatique, au lendemain de Noël, fut la pire nouvelle que j’aie reçue depuis longtemps. D’abord parce qu’il était un ami de très longue date. Mais surtout parce qu’il est difficile d’imaginer disparition plus sordide. Un jour, avec la femme qu’on aime, on fait un enfant, et c’est ce qu’il y a de plus beau au monde. On éclate de bonheur, on a tout l’avenir avec soi. Et dix-sept ans plus tard, on en meurt bêtement, brutalement, salement. Bernard était un confrère délicieux. Nous sommes nombreux à avoir du mal, depuis quelques jours, à trouver le sommeil…

En 2011, jurons, mes frères, de boire le café dans des tasses. Et non, comme les héros des séries TV américaines, dans de rugueux gobelets en carton. Marre qu’on nous impose, insidieusement, l’art de vivre sophistiqué de Starsky et Hutch, de Bobby Ewing et de Rocky IV. Voyez, en France, le nombre croissant de bars – dans les grandes gares, les zones commerciales, les aéroports, sur les autoroutes – où l’on vous sert désormais le café dans des machins en plastique ou des saloperies en carton. Le goût, l’arôme, l’amertume, la senteur, la finesse du café, rien à foutre ! Payez, buvez et jetez, nom de Dieu ! Et soyez heureux qu’on ne vous fasse pas payer la touillette !