Le blog de Bernard Lecomte

Les éditeurs français ont un mal de chien à réduire leur production romanesque, dont le volume frise l’absurde depuis des années, noyant les œuvres majeures et les pépites inconnues dans un flot de romans très moyens. La rentrée littéraire de 2023 rassure un peu : d’ici octobre paraîtront seulement (!) 473 romans français et étrangers, dont 328 romans français, parmi lesquels 74 premiers romans. C’est un progrès, quand on sait qu’une partie non négligeable de ces romans n’atteindront jamais les rayonnages des libraires de province…

La rentrée politique pointe à l’horizon. Les médias piaffent d’impatience. D’autant que le récent remaniement ministériel va permettre aux chaines d’info de renouveler leurs invités. Marre d’entendre toujours les mêmes extrémistes de gauche et de droite faire le buzz avec des punchlines irresponsables ! Les journalistes vont pouvoir inviter des figures ministérielles comme Patricia Mirallès, Thomas Cazenave, Patrice Vergriete, Sonia Backès, Hervé Berville, Charlotte Caubel, Olivier Becht… Mais non, je déconne !

Hallucinante interview de Sarkozy dans le Fig-Mag. Je cite… "Les Russes sont des slaves : ils sont différents de nous" : ben… et les Polonais, les Tchèques, les Ukrainiens, ce ne sont pas des slaves ? "Nous avons refusé l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN pour ne pas laisser Poutine dériver vers une paranoïa anti-occidentale" : bravo, c’est réussi ! "La Crimée était russe jusqu’en 1954" : il a fumé quoi, Sarko ? "L'Ukraine ne doit entrer ni dans l’Union européenne, ni dans l’OTAN" : eh bien, Poutine va être content !

C’est la dernière actualité de ce mois d’août étouffant. Une jeune chanteuse à la mode, Juliette Armanet, a déclaré haut et fort qu’elle était "dégoûtée" (sic) par la chanson "Les lacs du Connemara" de Michel Sardou (écrite par Pierre Delanoe et Jacques Revaux), qu'elle trouve "immonde", "scoute", "sectaire" et "de droite". Bon sang, ça, c’est de l’engagement, façon Justine Triet au festival de Cannes, ou Corinne Masiero aux Césars. Allez, camarades, on monte au front de l’anticapitalisme et on crie bien fort, en regardant la caméra : "Sardou, caca !"

Voilà qui risque d’apporter encore un peu de confusion dans l’histoire de l’écologie. Tenez-vous bien : le parti EELV ("Europe Ecologie Les Verts") a décidé de changer son nom et de s'appeler désormais "Les Ecologistes". A la veille des élections européennes de 2024, ce parti renonce donc au mot "Europe", ce qui laisse un peu perplexes les professionnels de la communication. D’autant qu’un petit parti vert s’appelle déjà "Les Ecologistes", ce qui va brouiller l’image des écolos dans les médias pendant des mois. On ne va pas s'ennuyer, le jour où ces gens-là gouverneront la France !

Benjamin Franklin, Thomas Jefferson et George Washington doivent se retourner dans leurs tombes. En voyant, certes, que le favori pour les présidentielles de 2024 est un type qui piétine du matin au soir les principes établis par les "pères fondateurs" de la démocratie américaine. Mais aussi en voyant que le candidat républicain qui remplacerait Trump au cas où, le gouverneur Ron DeSantis, vient d’interdire dans tous les collèges et lycées de Floride l’étude des œuvres de Shakespeare, parce que trop "sexuelles" ! Au secours !

C’est dingue. Même au mois d’août, Paris continue sa longue descente en enfer. On a appris, il y a quelques jours, qu’à l’occasion des Jeux Olympiques, on démontera toutes les boites à livres des bouquinistes qui iront se faire voir ailleurs ! Comme si ce scandale ne suffisait pas, on apprend que l’on va supprimer définitivement, au nom du bien-être animal (!), tous les poneys sur lesquels les enfants de Paris font leurs premières balades dans les parcs de la capitale. Je ne veux pas faire une fixette sur Hidalgo, mais il y a vraiment quelque chose qui ne va pas dans cette ville !

Personne n’est obligé d’acheter un journal dont il désapprouve l’orientation politique – ou de regarder une chaîne d’info qui l’escagasse par ses engagements. Ce qui se passe au JDD est navrant, c’est entendu, mais est-ce au gouvernement de dire, comme au temps de la monarchie, ce qu’il faut lire ou ne pas lire ? Au nom de quel dogme supérieur un représentant de l’Etat déciderait de boycotter le JDD, ou CNews, ou Valeurs Actuelles, ou Europe 1, dès lors que ces organes de presse ne violent pas la loi de la République ? Et si l’Etat considérait les citoyens comme des adultes ?

Il y a 332 millions d’habitants aux États-Unis. Un seul sera élu président l’an prochain. Et il y a de sérieuses chances pour que ce soit un milliardaire prétentieux, vulgaire, complotiste, inculte, incompétent, imprévisible, machiste, menteur, malhonnête et, d’ailleurs, condamné par la justice de son pays. Le monde entier s’interroge : les citoyens américains n’ont donc trouvé pour les diriger, au sein d’une population aussi riche et diverse, que ce crétin arrogant et dangereux qui représente si mal l’histoire et la culture de l’Amérique ?

Je suis abonné au "Monde" que je lis tous les jours. J’ai méticuleusement repris le journal daté des 3, 4 et 5 août, puis l’édition du week-end, tant j’avais du mal à le croire. Sachez, braves gens, qu'il n’y a jamais eu 1,5 million de jeunes chrétiens réunis autour du pape à Lisbonne pendant trois jours. Pas une ligne là-dessus, pas une photo légendée, rien ! L’événement n’a pas existé. Il aura fallu attendre l’édition de ce soir pour apprendre, en bas de la page 3, dans une brève de 9 lignes reprise de l’AFP, que les prochaines JMJ auront lieu à Séoul en 2027. Les bras m’en tombent.

On en remercierait presque Vladimir Poutine de rappeler à la terre entière la véritable nature de son régime : en Russie, un homme qui ose prétendre se présenter aux élections face au dictateur sortant est automatiquement condamné à 19 ans de goulag pour "extrémisme" (sic). Vu le sort d’Alexeï Navalny ? Tous les Russes sont prévenus ! Et tant pis pour le droit, la justice, la démocratie et toutes ces absurdités propres à l’Occident "dégénéré". Qu’il y ait encore des défenseurs de Poutine chez nous, en France, en 2023, me plonge dans un abîme de perplexité et de désolation.

Ils étaient 800.000, ce vendredi soir, au pied de la "Colline de la rencontre", à Lisbonne, ces jeunes venus de partout pour accueillir le vieux pape François et partager leurs émotions, leurs doutes, leurs espoirs, tout ce qui fait que la jeunesse est, décidément, imprévisible. D’où sortent ces centaines de milliers de garçons et ces filles qui n’ont à la bouche que "joie", "ensemble", "partage", "fête" et "espérance" ? Et qui ne veulent pas de ce triste monde que nous, leurs ainés, leur avons légué... A propos, quelqu'un pourrait-il en toucher un mot au journal Le Monde qui, au deuxième jour de l'événement, n'en a toujours pas dit un mot ?

Les papes se suivent et, quelles que soient leurs différences, ils disent tous la même chose. En arrivant à Lisbonne pour présider les JMJ, le pape François a prononcé un discours au clergé que Jean-Paul II aurait pu dire, mot à mot : "Avance au large !", "N’ayez pas peur !", c’est ce que le pape polonais, inventeur des JMJ, n’a cessé de dire, lui aussi, pour "retrouver le goût de l’évangélisation !" Par-delà les fautes, les bisbilles, les dérives et les divergences, c’est dans la continuité que l’Eglise chemine depuis deux mille ans.   

Les incivilités, les dégradations, l'irrespect, l’impolitesse, voilà l’’ennemi ! A la mairie de Vichy (03), on a pris le taureau par les cornes. Pour se marier, désormais, il faut d’abord signer une charte de bonne conduite et verser 1.000 euros de caution. On perd la caution si les mariés, ou les témoins, sont en retard de plus de 20 minutes. On la perd si des invités sont habillés en clodo ou vêtus d’un slip de bain. Ou s’ils jettent des confettis et des pétards dans les locaux municipaux. Il paraît que le dispositif fonctionne. Un exemple à suivre ?

Le chiffre est étonnant : plus de 40.000 jeunes Français participeront aux JMJ (Journées Mondiales de la Jeunesse) de Lisbonne, où le pape François les rejoindra mercredi, au milieu d’un million d’autres jeunes. Qui sont ces jeunes ? D’où sortent-ils ? A quoi croient-ils ? La logique voudrait que les médias s’interrogent, enquêtent, témoignent sur ce phénomène autrement plus important que tel ou tel fait divers. Mon petit doigt me dit que ce ne sera pas le cas : des jeunes cathos, majoritairement à droite, vous n’y pensez pas ! On prend les paris ?

L’un des charmes de Paris, particulièrement apprécié par les touristes, ce sont les bouquinistes des bords de Seine – au point que cette tradition parisienne va entrer au patrimoine mondial de l’Unesco. Eh bien, pendant les Jeux Olympiques, l’an prochain, ils devront déguerpir, eux, leurs livres poussiéreux et leurs coffres archaïques ! Place au sport, aux jeux, au business, à la sécurité ! Quel symbole : pas de livres pendant les JO ! Les organisateurs mesurent-ils l’incohérence, l’indécence et la régression que cette mesure signifie ?

Acceptera-t-on ou non les sportifs russes aux JO de Paris en 2024 ? Le silence des dirigeants du CIO est fascinant. La question, certes, n’est pas simple : d’autres pays sont en guerre, dont les sportifs seront présents. Alors ? Fermer les yeux sur la guerre de Poutine ? Accepter les Russes sous bannière "neutre" ? Belle hypocrisie, qui aboutira – comme on l’a vu, ce jeudi, aux Mondiaux d’escrime de Milan – à disqualifier tous les sportifs ukrainiens, même quand ils battent des Russes, un comble ! Va peut-être falloir prendre des décisions, là…

Et si la contre-offensive ukrainienne ne donnait aucun résultat ? Et si Vladimir Poutine confortait son pouvoir au Kremlin ? Ce ne sont que des hypothèses, certes, mais on a trop tendance à les occulter. Et si la Chine, ou la Turquie, ou je ne sais qui, parvenait à réunir des seconds couteaux des deux camps, des gens faciles à désavouer, au cas où, pour envisager ce qui pourrait se négocier (genre : le Donbass contre la Crimée). Il resterait à permettre aux Russes de transformer cela en une "victoire" pour Poutine, ce qui, au pays des mensonges les plus éhontés, n’est peut-être pas impossible…

L’invasion russe en Ukraine l’a spectaculairement prouvé : l’ONU ne sert à rien. On n’a pas besoin, à ce niveau mondial, de super-bureaucrates qui "réprouvent" sévèrement, qui "condamnent" formellement ou qui "s’inquiètent" gravement. On a besoin d’une organisation qui, au nom des peuples qui la constituent, soit capable d’exclure un de ses membres s’il viole les statuts établis et reconnus par tous les autres. Oui mais la Russie dispose de l’arme nucléaire ! Justement : si l’ONU n’a aucun moyen d’interdire les armes nucléaires, alors il faut inventer autre chose. Cqfd . 

L’Ukraine, c’est un peu plus grand que la France. C’est exactement au cœur de l’Europe. L’Ukraine, c’est la France – mais voisine de la Russie, pour son malheur. Bakhmout, c’est Colmar – une ville moyenne, dans l’est, qui ne demandait qu’à vivre tranquille. Odessa, c’est Marseille – une métropole maritime au passé prestigieux et au patrimoine exceptionnel. Les Français peuvent-ils imaginer des navires de guerre russes, au large de Marseille, bombarder la Bonne Mère ? C’est pourtant la réalité, à 2.500 km près. C’est pour cela qu’on ne peut oublier les Ukrainiens.